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Travailler à une juste valorisation des produits agricoles et alimentaires

Avec mon collègue eurodéputé Jérémy Decerle (membre de la commission agriculture au Parlement européen) et Stéphane Travert (député de la Manche et ancien ministre de l’Agriculture), nous nous sommes rendus il y a quelques jours dans une ferme normande pour échanger avec l’ensemble des grandes enseignes de la distribution. 

Pourquoi ce format original ? Certainement pas pour accuser qui que ce soit en particulier, ou distribuer des points. Ni pour nous immiscer dans quelque sujet conjoncturel. Simplement pour créer les conditions d’un premier échange franc, prospectif, sur les solutions que nous pourrions promouvoir, en tant qu’élu(e)s, pour avancer sur un sujet qui parait si souvent bloqué. 

De cet échange avec la grande distribution, nous avons identifié plusieurs freins, qui entravent la juste valorisation des produits agricoles et alimentaires.

Valoriser les produits agricoles et alimentaires : l’affaire de toutes et tous ! 

En tant que députés européens — peut-être plus encore que les autres citoyens parce que nous sommes impliqués dans la construction des règles qui construisent, accompagnent et encadrent l’activité économique, notamment agricole —, nous sommes souvent perplexes face aux difficultés que la chaine de valeur rencontre, en France et ailleurs en Europe, à rémunérer de façon juste un de nos besoins essentiels : notre alimentation.

Avant toute chose, il y a un premier constat, qui relève de l’évidence. Qu’il s’agisse de la restauration hors foyer ou que l’on soit distributeur, industriel, producteur ou politique, nous avons tous notre part de responsabilité. 

Le deuxième constat que nous pouvons dresser (et qui nécessitera d’être approfondi, que ce soit dans la même configuration ou avec d’autres parties prenantes) est le suivant ; la situation actuelle n’est confortable pour personne. Étant donné que celle-ci résulte d’un certain rapport de force, cet équilibre — si précaire — n’en est pas un. 

Plusieurs leviers à actionner 

Il existe des pistes de solution pour redonner des perspectives durables à l’agriculture. Mais aujourd’hui, ce secteur-clé n’est pas assez serein pour relever les défis qui l’attendent, à commencer par le défi environnemental et climatique. L’organisation des filières et la loi française ont déjà été adaptées aux spécificités agricoles pour permettre certains progrès. En revanche, il est un peu tôt pour faire un bilan complet des États généraux de l’alimentation, initiative exemplaire, qui s’est déjà traduite, notamment, par des plans de filière et deux lois, dont la dernière vient d’entrer en vigueur (loi EGalim 2). Ajoutons à cela que les règles de concurrence de l’Union européenne qui s’appliquent au secteur agricole nécessitent d’être réformées en profondeur afin que nous puissions redonner aux agriculteurs un pouvoir de marché. En effet, les tentatives d’adaptation du droit de la concurrence aux spécificités du monde agricole se sont, jusqu’à présent, révélées infructueuses ou marginales. 

A l’issue de cette rencontre avec la grande distribution, nous pouvons néanmoins tirer quelques premiers enseignements ; il reste des verrous à faire sauter pour cesser de dévaloriser trop souvent notre alimentation et nos agriculteurs, tout en respectant les attentes des consommateurs en termes de pouvoir d’achat et de qualité des produits. Des verrous dans le droit européen, certainement, qui n’est plus à jour face aux enjeux ; dans le droit français encore peut-être ; mais aussi dans la stratégie des opérateurs pour construire la valeur et la transparence, regrouper davantage l’offre quand cela s’avère nécessaire et communiquer avec pédagogie auprès des consommateurs. 

Nous nous félicitons du bon état d'esprit de ce premier échange avec la grande distribution et souhaitons prolonger la réflexion commune. 

Signataires de l’article : Jérémy Decerle (député européen et membre de la Commission de l'Agriculture au Parlement européen), Stéphane Travert (député de la Manche et ancien ministre de l’Agriculture) et Stéphanie Yon-Courtin (députée européenne et vice-présidente de la commission ECON).