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Euractiv I Traduire la « loi influenceurs » au niveau européen ? L’idée fait son chemin à Bruxelles
Deux députées européennes françaises ont déclaré mercredi (28 juin) souhaité lancer une réflexion autour d’une réglementation européenne sur les influenceurs commerciaux en ligne, s’inspirant de la législation récemment adoptée en France.
L’eurodéputée centriste Stéphanie Yon-Courtin (Renew) et sa collègue socialiste Aurore Lalucq (Socialistes et démocrates européens) se sont positionnées en fers de lance pour une harmonisation des règles européennes afin de mieux contrôler le « far west » de l’Internet, selon elles, et protéger plus efficacement les consommateurs contre les pratiques commerciales abusives.
Si les contours d’une réforme sont encore bien loin d’être actés, MMe Yon-Courtin et Lalucq veulent s’appuyer sur le règlement sur les services numériques (Digital Services Act, DSA), qui régit les responsabilités des grandes plateformes digitales, et les oblige à mettre en place des mécanismes de signalement, puis d’agir en conséquence.
Au début du mois, le parlement français a adopté une loi visant à clarifier ce que les influenceurs peuvent et ne peuvent pas promouvoir ; à formaliser la relation contractuelle entre les entreprises, les influenceurs et leurs agents ; et à faire en sorte que les plateformes soient dans l’obligation de signaler les comptes illégaux.
Les deux auteurs de la loi française, les députés Arthur Delaporte et Stéphane Vojetta, se sont exprimés lors d’un évènement au Parlement européen mercredi pour présenter le détail de leur travail.
La loi, ont-ils déclaré, met en œuvre des limitations strictes sur la promotion des cryptoactifs, considérés comme des investissements « à haut risque ». Il est également interdit aux influenceurs de promouvoir des informations sur la chirurgie plastique.
Les législateurs français, dans un accord transpartisan, ont également établi une définition générale de l’influence commerciale. Toute personne qui, « à titre onéreux, communique au public par voie électronique des contenus visant à faire la promo, directement ou indirectement, de biens, de services ou d’une cause quelconque exerce l’activité d’influence commerciale par voie électronique ».
Sans législation, la confiance que créent les influenceurs avec leurs audiences peut être abusée, et « l’audience se retrouve prisonnière d’un certain discours au sujet duquel il lui manque de l’information », a affirmé M. Vojetta. « Il nous incombe de protéger les consommateurs, en particulier les plus jeunes », a-t-il ajouté.
Des dispositions sectorielles, pas de législation horizontale
La Commission, qui, contrairement au Parlement, dispose de l’initiative législative, envisage déjà une révision de la législation européenne existante en matière de protection des consommateurs sous la forme d’un règlement sur l’équité numérique (Digital Fairness Act).
Dans ce contexte, elle analyse si ces législations encadrent suffisamment les pratiques des influenceurs.
Toutefois, aucune proposition n’est attendue avant le début du prochain mandat législatif en juin de l’année prochaine.
Malgré tout, Mme Yon-Courtin et Mme Lalucq souhaitent commencer à travailler dès maintenant et s’assurer que les dossiers en cours de négociation au Parlement européen contiennent des dispositions adéquates.
« Nous devons mettre en cohérence les textes existants », a déclaré Mme Yon-Courtin.
La cohérence s’appliquerait en particulier dans le contexte de la stratégie d’investissement de détail et du règlement sur les marchés de cryptoactifs (MiCA). Dans les deux cas, les députés prévoient que des dispositions spécifiques pourraient être ajoutées pour protéger les pratiques commerciales des influenceurs en ce qui concerne les conseils en matière d’investissement.
Plutôt que de viser une réglementation horizontale sur les activités d’influence en ligne — qui ne serait vraisemblablement pas adoptée avant les élections européennes — les deux eurodéputés cherchent donc à adapter les dossiers existants et en cours de négociation à la réalité de l’influence commerciale en ligne et à ses abus éventuels.
Tous les regards braqués sur le DSA
La loi française, un modèle pour l’action européenne, devance la transposition du DSA. Les règles telles qu’elles figurent dans le texte français obligent les plateformes à disposer de ressources adéquates pour signaler tout contenu commercial potentiellement préjudiciable et à agir rapidement.
Néanmoins, il n’est pas certain que les plateformes disposeront des ressources nécessaires en temps utile pour s’acquitter de leurs nouvelles obligations légales. « J’ose espérer que les plateformes seront prêtes », a déclaré M. Delaporte.
« Est-ce qu’elles mettront des moyens suffisants pour faire la modération, effectuer éventuellement les contrôles et assurer leurs obligations ? Ça reste à voir », a-t-il ajouté.
Mme Yon-Courtin a également insisté sur la nécessité que la Commission dispose de plus de ressources pour s’assurer que les plateformes de l’UE respectent leurs obligations légales dans le cadre du DSA, qui commencera à s’appliquer aux plus grandes plateformes en ligne en août.
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