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L'Echo I Macron pousse l'Américaine Scott Morton à renoncer à un poste clé de l'UE

L'opposition de l'Élysée, de commissaires et de groupes parlementaires ont eu raison du recrutement de l'Américaine Fiona Scott Morton à un poste clé de Commission.

 L'Union européenne (UE) n'est pas une multinationale pouvant recruter ses meilleurs éléments à travers le monde, mais une entité supranationale composée d'États attachés tant au projet européen qu'à leur souveraineté. En désignant l'économiste américaine Fiona Scott Morton à un des postes les plus élevés de la puissante DG Concurrence, la commissaire Marghrete Vestager et la présidente de la Commission Ursula von der Leyen ont négligé cette réalité. L'affaire a déclenché une crise, à quelques jours des vacances politiques, dont l'UE se serait bien passée. 

 Fiona Scott Morton, professeure à la Yale School of Management, avait été nommée le 11 juillet dernier économiste en chef de la DG Concurrence. Son recrutement, appuyé par la commissaire Vestager, avait provoqué un tollé dans plusieurs capitales, en particulier à Paris, au Parlement européen et jusque dans les rangs de la Commission. Sous pression, l'Américaine a jeté l'éponge, mercredi matin, dans un courrier succinct adressé à la commissaire danoise, où elle invoque "la controverse politique" causée par sa désignation. 

 Une première dans l'histoire de l'UE 

Cette brillante économiste présentait toutes les qualifications pour le poste. En plus de ses recherches universitaires sur la concurrence, elle avait été titulaire d'un poste élevé au sein de la division antitrust du département de la Justice des États-Unis sous Barack Obama. Elle était arrivée en tête, sur onze candidats, d'une procédure de sélection lancée en mars ouverte à des candidats étrangers à l'UE. 

 La nomination d'un non Européen à un poste aussi élevé aurait été une première dans l'histoire de l'UE. La Commission aurait dû lui octroyer une dérogation, ce type de fonction stratégique étant réservée aux Européens. 

 Son profil présentait de sérieux risques de conflit d'intérêt. Elle avait travaillé pour plusieurs géants de l'internet, dont Apple, Microsoft et Amazon. Lors de sa mission dans l'administration Obama, elle s'était montrée réticente à recadrer les GAFAM. 

 En tant qu'économiste en chef de la DG Concurrence, elle aurait dû assurer la mise en œuvre de la directive sur les services numériques, chargée de réguler l'activité des GAFAM et de protéger les utilisateurs, bloquer les fusions et sanctionner les comportements illégaux de ces entreprises. 

 La fronde de cinq commissaires 

 La fronde contre sa nomination est venue de cinq commissaires européens, et non des moindres. Le Haut représentant de l'UE aux Affaires européennes, Josep Borrell, les commissaires chargés de l'Industrie, Thierry Breton, des Affaires économiques, Paolo Gentiloni, de la cohésion, Elisa Ferreira, et de l'Emploi, Nicolas Schmit. Dans une lettre adressée à Ursula von der Leyen, ils demandaient à ce que le recrutement soit "ré-évalué". 

 L'affaire, qui menaçait l'unité de la Commission, devait être discutée mercredi au collège. La renonciation de Scott Morton a éteint la crise. Mais elle pourrait laisser des traces alors que la commission von der Leyen entame la dernière année de son mandat. 

 Le Parlement européen avait demandé à la commissaire Vestager de venir s'expliquer. "J'ai essayé d'engager la meilleure personne possible pour ce job", avait-elle dit aux députés, en expliquant qu'elle n'aurait qu'une fonction de conseiller. 

 "Cette nomination va à l'encontre de notre souveraineté", avait répliqué l'eurodéputée Stéphanie Yon-Courtin (RE). 

Le coup d'estoc de Macron 

Le coup d'estoc est venu, au paroxysme de la crise, du président français Emmanuel Macron, qui s'est exprimé contre cette nomination mardi, en marge du sommet entre l'UE et l'Amérique latine. 

 "Je serais ouvert à une telle configuration si les Américains engageaient un chercheur européen qui serait au cœur des décisions de la Maison-Blanche, ou si les Chinois faisaient de même. Mais, je vois que la loi leur interdit de le faire", avait-il dit. 

 "Si nous n'avons aucun chercheur européen de ce niveau pour être recruté par la Commission, ça veut dire que nous avons un très grand problème avec tous les systèmes académiques européens", avait-il ajouté. 

 Vestager avait adressé une fin de non-recevoir à la France et suggéré que Scott Morton soit écartée durant 2 ans des dossiers liés aux GAFAM. De plus, 39 économistes des deux côtés de l'Atlantique avaient récemment cosigné une lettre ouverte pour la soutenir. 

 Cette résistance fut de pure forme. Après la sortie de Macron, il était devenu impensable pour Fiona Scott Morton d'exercer sa nouvelle mission sereinement. La pression commençait aussi à monter sur Vestager qui risquait de perdre ses chances d'être nommée à la présidence de la BEI.

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