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Le Marin - Accord de pêche avec le Royaume-Uni : une « première étape à concrétiser » selon le secteur français - 20/05/2025

Accord de pêche avec le Royaume-Uni : une « première étape à concrétiser » selon le secteur français

Le Royaume-Uni et l’Union européenne ont conclu lundi 19 mai un « nouveau partenariat stratégique » lors d’un sommet inédit depuis le Brexit il y a cinq ans. Les négociations, âpres, ont débouché sur la prolongation sur 12 ans de l’accès aux eaux britanniques pour la flottille européenne mais les contreparties, notamment l’assouplissement de certaines barrières commerciales, restent à définir et incitent la filière à la prudence. Réactions.

Le Royaume-Uni et l’Union européenne ont conclu, lundi 19 mai, un nouveau partenariat stratégique lors d’un sommet inédit depuis le Brexit il y a cinq ans. Les négociations, entamées bien en amont, se sont poursuivies jusqu’à la veille du rendez-vous officiel. Pour finalement voir actée la reconduction de l’accès des pêcheurs européens aux eaux britanniques jusqu’en 2038.

L’accord remplace ainsi les dispositions actuelles qui expirent en juin 2026. Sujet ô combien sensible pour la France, qui, pour rappel,avait obtenu une baisse d’environ 25 % de son activité de pêche sur cinq ans en 2020. En échange, l’UE et le Royaume-Uni ont convenu de mesures visant à apaiser les tensions commerciales, notamment une simplification des règles et contrôles sanitaires et phytosanitaires, au bénéfice des exportateurs comme des consommateurs , une des priorités du gouvernement travailliste, alors que les exportations britanniques ont nettement reculé depuis le Brexit.

Un accord salué en France

L’issue de ces négociations, bien que le texte final et les conditions d’accès spécifiques soient encore en suspens, a été saluée positivement, notamment par la ministre de la Pêche Agnès Pannier-Runacher, saluant le fait que les relations en matière de pêche ont été érigées comme un préalable à tout accord global sur les sujets sur lesquels le Royaume-Uni souhaite un approfondissement des relations ». Une réussite diplomatique saluée par la classe politique. C’est une bonne nouvelle puisque nous appelions de nos vœux plus de visibilité pour les pêcheurs européens, singulièrement français, au-delà de 2026 , a ainsi commenté l’eurodéputée Isabelle Le Callennec.

À l’instar de Stéphanie Yon-Courtin, députée européenne et vice-présidente de la commission de la pêche au Parlement européen, qui juge que cet accord permettra de garantir un accès continu et de long terme à nos navires dans les eaux britanniques . Une priorité selon l’élue pour éviter une remise en cause de nos droits de pêche, et apporter de la prévisibilité et de la sécurité aux professionnels de la pêche dans nos territoires, comme dans ma région en Normandie .

Veiller à l’entrée en vigueur rapide

Les deux députées européennes préconisent néanmoins la prudence concernant l’inscription concrète de l’accord dans la loi. Il faudra veiller à son entrée en vigueur rapide et effective, commente Stéphanie Yon Courtin. Je continuerai aussi de défendre un cadre de coopération plus exigeant avec le Royaume-Uni sur les autres sujets de préoccupation en matière de pêche.

Pour Isabelle Le Callennec, il ne faudra pas oublier les autres points de négociations encore en suspens et s’assurer « que la question des quotas, des licences, des modalités techniques d’accès et des aires marines protégées, qui ne vont pas manquer de faire l’objet de discussions approfondies, donneront satisfaction aux deux parties.

Du côté des professionnels, même son de cloche. Si le président du comité régional des pêches des Hauts-de-France Olivier Leprêtre salue une très bonne nouvelle , il attend néanmoins que la décision soit ancrée dans le marbre ». Et juge, malgré la reconduction de l’accord jusqu’en 2038, que les Britanniques continuent quand même de récupérer leurs os de manière indirecte, avec des mesures techniques draconiennes qui empêchent de pêcher du poisson.

Récemment, l’Organisation de gestion marine britannique (MMO) a condamné très sévèrement pour la première fois un pêcheur français pour avoir chaluté dans une des 13 aires marines protégées interdites à la pêche. Par ailleurs, depuis le 16 décembre 2024, de nouvelles réglementations sont mises en place dans la Manche par le Royaume-Uni, excluant les senneurs des 12 milles. Pour Olivier Leprêtre, le résultat est presque le même car les pêcheurs européens évitent d’aller dans leurs eaux. Dimitri Rogoff, le président du comité des pêches normand, est du même avis. La première étape est franchie. À présent, il faut avoir les détails de l’application de l’accord dans la ZEE et notamment concernant les droits de nos pêcheurs dans leurs 6-12 milles.

Un signal fort d’unité

Plus largement, le secteur européen rappelle que l’accord de commerce et de coopération de 2020, bien que politiquement nécessaire, a lourdement pesé sur le secteur de la pêche de l’UE. Il a réduit de 25 % la valeur des débarquements dans les eaux britanniques et a entraîné le démantèlement de la flotte européenne et la perte de moyens de subsistance dans plusieurs États membres , rappelle Europêche. Les professionnels européens félicitent néanmoins la Commission européenne, les États membres et le Parlement européen pour leurs efforts coordonnés qui ont envoyé un signal fort d’unité et de dévouement à la viabilité à long terme du secteur européen de la pêche.

La prolongation de l’accès à la pêche jusqu’en 2038 apporte une stabilité essentielle à notre flotte et aux communautés côtières, tandis que la réduction des barrières commerciales favorise l’accès au marché de l’UE et l’accessibilité alimentaire au Royaume-Uni. C’est un exemple clair de ce qu’une coopération pragmatique et constructive peut apporter , a souligné Daniel Voces, directeur général d’Europêche.

Europêche souligne que la collaboration continue et la prévisibilité sont essentielles pour une gestion durable des pêches et pour garantir que les produits de la mer restent une source alimentaire compétitive, sûre et accessible pour les consommateurs européens et britanniques. Ces mesures pour la pêche, visant à approfondir la coopération, élargies dans les domaines de l’énergie et de la défense, devraient, selon Downing street, rapporter près de 9 milliards de livres (NDLR : 10,7 milliards d’euros) à l’économie britannique d’ici 2040 .

L’accord entre le Royaume-Uni et l’Union européenne sur la partie pêche a été salué, côté français, par la classe politique comme les professionnels de la filière.

Mélanie CHARTIER