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Le Soir I Conflits d’intérêts : la Commission joue le « circulez, y’a rien à voir » pour la nomination de Fiona Scott-Morton

Une Américaine, qui a été consultante pour Amazon, Apple et Microsoft, a été nommée un poste clé pour la régulation des Gafam, à la Commission européenne. La commissaire à la Concurrence Margrethe Vestager assure que toutes les procédures ont été respectées. La ligne de défense ne varie pas d’un iota, depuis le début de la polémique. Fiona Scott-Morton a été nommée il y a une semaine économiste en chef à la Direction générale de la concurrence, un poste stratégique à la Commission européenne. Et ses opposants craignent un conflit d’intérêts mais aussi des ingérences de Washington dans la régulation des grandes entreprises de la tech. La polémique a amené la commissaire européenne à la Concurrence à s’expliquer devant les eurodéputés ce mardi après-midi. Margrethe Vestager a répété la partition jouée ces derniers jours par la Commission européenne, sur le mode du « circulez, y’a rien à voir ».   

 Les griefs contre Fiona Scott-Morton ne manquent pas, même si personne ne doute des compétences de cette professeure à Yale. Mais celle qui aura un poste clé dans la régulation du secteur a travaillé comme consultante pour des grands groupes comme Amazon, Apple ou encore Microsoft. Selon les règles en vigueur, Fiona Scott-Morton sera empêchée de travailler sur les dossiers précis qu’elle a eus à traiter dans le passé. Par ailleurs, pendant deux ans, elle ne pourra pas approcher des entreprises qui ont été son employeur l’année précédente. Deux ans… sur un mandat de trois (plus d’un renouvellement de deux ans). Selon la commissaire européenne, « cela ne concerne qu’une poignée de cas ». « Elle sera parfaitement capable de faire son travail sur la législation sur le marché numérique (DMA) et sur la réglementation des subventions étrangères », assurait-elle devant les eurodéputés. Cependant, souligne Margrethe Vestager, les services de la Commission sont encore en train d’évaluer dans quelle mesure Fiona Scott-Morton sera empêchée, alors même que sa nomination a été actée il y a une semaine. Selon la commissaire, qui ne s’étend pas sur les détails pour des « raisons de confidentialité », toutes les procédures ont été et seront respectées.   

 Ses détracteurs reprochent aussi à cette Américaine ses anciennes fonctions dans l’antitrust au ministère de la Justice américaine. Ils y voient la possibilité d’une manipulation de la part de Washington, qui ne partage pas les mêmes vues que l’Union européenne sur les Gafam. Par ailleurs, ses opposants s’étonnent qu’un tel poste ait été offert à une Américaine, alors que seuls des ressortissants européens peuvent travailler pour les institutions, à quelques rares exceptions près. « Il a été décidé d’ouvrir le poste à des candidats non européens en raison des spécificités des compétences nécessaires », a indiqué une porte-parole de la Commission fin de semaine dernière. « Ce n’est pas un poste ordinaire », a plaidé Margrethe Vestager, qui a participé aux dernières étapes du recrutement. « Nous ne devons pas priver la Commission européenne » de profils comme ceux de Fiona Morton-Scott.   

 Les critiques fusent de toutes parts. L’affaire est remontée jusqu’à des membres importants du gouvernement français. Aux côtés de deux de ses collègues, la ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna, est allée jusqu’à demander à « reconsidérer » cette nomination. Quatre présidents de groupe au Parlement européen (PPE, S&D, Renew et Verts) avaient transmis une lettre à la Commission. L’un des signataires, le Belge Philippe Lamberts, a fini par changer son fusil d’épaule. « Après m’être entretenu avec Fiona Scott-Morton aujourd’hui, mes préoccupations ont été prises en compte.   

 Son expertise en matière de politique de concurrence nous aidera à lutter contre le pouvoir excessif du marché, au bénéfice des contribuables et des consommateurs européens », a tweeté l’eurodéputé belge. « Je suis très déçue », réagit l’eurodéputée Stéphanie Yon-Courtin (Renew, centristes et libéraux), à l’initiative de l’audition de Margrethe Vestager. « La Commission ne semble pas comprendre que le Parlement européen s’intéresse à cette nomination. »   

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