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Franceinfo | Plan de relance, pacte vert, salaire minimum... On a listé les dossiers importants qui attendent la France durant sa présidence de l'UE

Par Elise Lambert & Valentine Pasquesoone

La France assure à partir du 1er janvier 2022 la présidence tournante du Conseil de l'Union européenne. Si le programme officiel n'a pas encore été dévoilé, plusieurs dossiers sont d'ores et déjà sur la table. 

 Treize ans après sa dernière présidence tournante, la France prend à nouveau la tête du Conseil de l'Union européenne du 1er janvier au 30 juin 2022. Lors de ces six mois, Paris a pour mission de suivre l'agenda législatif européen et de trouver des compromis entre les gouvernements sur plusieurs dossiers phares. Emmanuel Macron dévoilera ses priorités, jeudi 9 décembre, lors d'une conférence de presse. Le président a déjà précisé qu'elles se définiraient autour de trois notions : "relance, puissance, appartenance". Voici ce que l'on sait des dossiers qui seront abordés. 

Le suivi du plan de relance européen 

"Nous porterons l'ambition d'une relance européenne souveraine et solidaire", a assuré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, lors d'un débat sur les priorités de la présidence française de l'UE au Sénat, le 16 novembre. Moins de deux ans après le début de la crise du Covid-19, et alors que de nombreux pays européens traversent une cinquième vague épidémique avec l'apparition du variant Omicron, le gouvernement français devra créer un consensus entre les Etats membres afin de poursuivre la reconstruction de l'économie européenne. 

 Lors de la présidence allemande, au second semestre de 2020, la chancelière Angela Merkel avait réussi à négocier un plan de relance économique de 750 milliards d'euros,. La France devra trouver avec les autres Etats membres les ressources permettant de rembourser cet emprunt commun. Les intérêts doivent commencer à être remboursés en 2023 et le capital en 2028, précise Touteleurope.eu, un site d'informations sur l'Europe créé par la France et la Commission européenne. 

 L'application du "Green Deal" 

 Lors de son discours au Sénat, Jean-Yves Le Drian a également assuré que "le Pacte vert de juillet devra être mis en œuvre". Le ministre des Affaires étrangères français faisait référence au "Green Deal" européen ou "pacte vert pour l'Europe" présenté par la Commission européenne en juillet 2021. Il contient une série de mesures visant à atteindre la neutralité climatique d'ici à 2050 et à réduire les émissions de gaz à effet de serre de l'UE de 55% d'ici à 2030. 

Pour atteindre ces objectifs, l'exécutif européen souhaite mettre en place un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières. Cet outil doit permettre à l'Union européenne de définir un seuil d'émission de gaz à effet de serre à partir duquel une activité économique est considérée comme trop polluante. Si un bien importé dans l'UE dépasse ce seuil, il sera alors soumis à un surcoût, rappelle le site Touteleurope.eu. Devant le Sénat, Jean-Yves Le Drian a exprimé son souhait de "faire valider le mécanisme d'ajustement carbone au cours de la présidence française". 

 Les négociations sur un salaire minimum 

 La France souhaite aussi achever les négociations sur le salaire minimum dans l'Union européenne. "La position du Parlement est d'imposer un salaire minimum décent. L'idée n'est pas d'appliquer le même seuil partout mais de le déterminer en fonction du salaire médian de chaque pays", précise l'eurodéputée Leïla Chaibi (La France insoumise), membre de la commission des affaires sociales. 

 "Pour mon groupe [le groupe de la gauche], le salaire minimum doit être égal à 75% du salaire médian et il doit aussi prendre en compte le coût de la vie courante." 

 L'eurodéputée Leïla Chaibi  à franceinfo 

 Dans l'Union européenne, les salaires minimaux mensuels varient de 332 euros brut en Bulgarie à 2 202 euros brut au Luxembourg, selon les données d'Eurostat. "Pour le moment, les Nordiques s'opposent à l'harmonisation du salaire minimum, quel que soit leur groupe politique. Pour eux, tout ce qui concerne le salaire ne doit pas se régler par la loi mais entre les partenaires sociaux, glisse Leïla Chaibi. Les pays de l'Ouest, comme la France et l'Allemagne, y sont favorables, sauf les conservateurs." 

 Le statut des travailleurs des plateformes numériques, comme Deliveroo ou Uber, sera également examiné. "Nous poussons pour que l'accès à la protection sociale et à la négociation collective des travailleurs des plateformes numériques soit mis sur la table", a assuré Jean-Yves Le Drian devant le Sénat. De son côté, le Parlement européen a déjà voté pour une "présomption de salariat" en septembre 2021. En cas de procédure judiciaire, les entreprises doivent prouver l'absence de subordination avec les travailleurs, sinon ces derniers sont considérés comme salariés. 

 La régulation des plateformes numériques 

 "Il faut défendre la souveraineté numérique en développant un modèle de régulation européen. Ce sera l'objet des négociations sur les règlements DMA et DSA", a annoncé Jean-Yves Le Drian. Le "Digital Markets Act" (DMA), porte sur les marchés. Il vise à réprimer les pratiques anticoncurrentielles des grands groupes de la Silicon Valley, notamment Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft (les "Gafam"). "Google ne pourra plus mettre en avant dans son moteur de recherche ses entreprises partenaires. Si vous cherchez un hôtel, il devra vous proposer le meilleur, selon vos critères", explique l'eurodéputée (LREM) Stéphanie Yon-Courtin, rapporteure sur le DMA. 

 "On ne veut pas attendre les poursuites judiciaires qui prennent trop de temps. On veut créer des obligations en amont, avant qu'il y ait une pratique anticoncurrentielle." 

 Stéphanie Yon-Courtin, députée européenne à franceinfo 

 Le "Digital Services Act" (DSA) entend lui lutter contre la fraude et les contenus illégaux en ligne. Il imposera aux plateformes de mettre en œuvre des moyens pour modérer les contenus préjudiciables qu'elles hébergent. "La loi actuelle qui réglemente les contenus illégaux date de 2008, quand les réseaux sociaux n'avaient pas la place centrale qu'ils occupent aujourd'hui, justifie Stéphanie Yon-CourtinAujourd'hui, nous voulons faire en sorte que ce qui est interdit hors ligne le soit également en ligne."  Mais des différends existent déjà au sein de l'UE. "Les pays de l'Est, libéraux, ne veulent rien interdire, par exemple. La définition de 'contenu préjudiciable' est propre à la culture de chaque pays", décrit l'élue de la majorité. La France entend finaliser les deux lois avant l'été pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2023.

 La renforcement de la défense européenne 

 Comme l'avait annoncé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, lors de son discours sur l'état de l'Union, un sommet sur la défense européenne aura lieu en mars prochain à Toulouse. Le retrait chaotique des troupes américaines d'Afghanistan a relancé le débat de l'autonomie européenne et "le moment est venu pour l'Europe de passer à la vitesse supérieure", a plaidé la cheffe de l'exécutif européen. 

 Cet objectif s'incarne par la "Boussole stratégique" qui fixe les orientations de la politique de sécurité et de défense commune. "Cela passe par une approche européenne des menaces, le développement de nos capacités opérationnelles et industrielles et la défense de nos intérêts, notamment dans l'espace exo-atmosphérique [la zone de l'atmosphère où peuvent se trouver les satellites], devenu un espace de confrontation", a développé Jean-Yves Le Drian devant le Sénat. 

 La réforme de l'espace Schengen 

 En raison de la pandémie de Covid-19, la liberté de circulation au sein de l'espace Schengen devrait faire l'objet d'une réforme. La Commission a proposé un projet de révision qui pourrait être débattu sous la présidence française. 

 Sa stratégie consiste à renforcer le contrôle aux frontières extérieures pour préserver la libre circulation à l'intérieur de cet espace, rapporte Le Monde. Pour parvenir à cet objectif, Bruxelles entend doter l'agence Frontex, chargée du contrôle aux frontières, de 10 000 agents et d'un budget de 6 milliards d'euros. 

 Bruxelles souhaite également une "gouvernance solide" de l'espace Schengen, en mettant en place des mécanismes de contrôle ou des visites inopinées de fonctionnaires européens à des endroits stratégiques, pour vérifier que les règles sont bien appliquées, reprend Le Monde.

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