Une économie européenne qui risque de décrocher Avec le retour de Trump au pouvoir, difficile de saisir avec précision quelle sera l’ampleur du choc, tant cela va dépendre de la réaction de chacun des États membres, mais aussi de l’exposition des secteurs et des entreprises à l’économie américaine. « 10 ou 20 % de tarifs douaniers, cela reste gérable pour des entreprises qui ont une marge importante et une compétitivité hors prix, estime Sarah Guillou, économiste à Sciences Po Paris. En revanche, les sociétés qui ne sont pas en mesure de jouer sur leur marge seront pénalisées. » L’Europe va aussi se retrouver sous la pression des exportations chinoises. Car Pékin ne pouvant pas accéder au marché américain devrait réorienter sa surproduction vers l’UE, qui est aujourd’hui son premier partenaire commercial. Résultat, des produits chinois à des prix très compétitifs débarqueront sur le Vieux Continent. « L’Union européenne est dans une situation délicate, car sa croissance patine et les marchandises bon marché en provenance de l’empire du Milieu constituent un carburant pour sa consommation. Donc, faute de politique industrielle propre, elle peut difficilement s’opposer à l’arrivée de ces nouveaux flux », explique Benjamin Bürbaumer, maître de conférences en sciences économiques à Sciences Po Bordeaux. Et même si l’UE décide de relever ses tarifs douaniers à l’encontre de la Chine, il n’est pas certain que cela suffise, les prix des produits chinois restant beaucoup plus faibles. L’unité européenne mise à l’épreuve La prochaine Commission européenne saura-t-elle répondre à ces nouveaux défis ? En Hongrie, les Vingt-Sept espèrent s’accorder sur des pistes communes ; une « déclaration de Budapest » doit être adoptée ce vendredi. Les thématiques du renforcement du marché intérieur, du parachèvement de l’Union des marchés de capitaux comme de l’indépendance énergétique devraient trouver leur place dans ce document. Mais d’autres points, celui du financement au premier chef, sont loin d’être consensuels, et les États membres pourraient longuement s’écharper sur la marche à suivre. Or, le temps presse. Pour Mark Leonard, directeur du Conseil européen pour les relations internationales (ECFR), il est en effet « vital » pour les Européens d’utiliser les prochaines semaines pour s’entendre sur leurs intérêts communs, en matière de sécurité comme d’économie, « et de savoir comment les défendre », afin de se prémunir contre toute « pression » potentielle en provenance des États-Unis. Si les Vingt-Sept ont déjà prouvé qu’ils étaient capables de faire front commun dans les périodes de crise, reste à savoir s’ils parviendront à maintenir cette unité face à un Donald Trump, bien souvent tenté de semer la discorde. À Budapest, Viktor Orban n’a jamais caché son admiration pour Donald Trump. Sur le réseau social X, il a été l’un des premiers à féliciter le Républicain pour sa victoire. Puis il s’est vanté d’avoir échangé par téléphone avec le président américain : « Nous avons de grands projets pour le futur ! », a-t-il clamé. « Il existe des affinités entre le premier ministre hongrois Viktor Orban, la présidente du Conseil italien, Giorgia Meloni, et Donald Trump. Il n’est pas exclu que ce dernier en joue pour diviser les Européens, en appliquant par exemple de droits de douane plus faibles aux marchandises hongroises et italiennes », explique la chercheuse Agathe Demarais. « Unie dans la diversité », disait la devise européenne. Des dirigeants européens réunis à Budapest, en Hongrie, en novembre. Donald Trump entend renforcer considérablement la politique protectionniste déjà mise en œuvre par Washington.