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La Nouvelle République I L’Américaine Fiona Scott Morton renonce à un poste clé de l’UE après une polémique

L’économiste Américaine Fiona Scott Morton a renoncé au poste clé de l’UE pour la régulation des géants de la tech, mercredi 19 juillet 2023, après une polémique sur sa nationalité et une série de vives critiques depuis l’annonce de sa nomination.

Après une semaine de polémique centrée sur sa nationalité américaine et les doutes exprimés, notamment, par Emmanuel Macron, l’économiste Fiona Scott Morton a annoncé qu’elle renonçait à briguer un poste clé de l’UE pour la régulation des géants de la tech, dans une lettre publiée mercredi 19 juillet 2023 par la commissaire européenne Margrethe Vestager. 

 « Fiona Scott Morton m’a informée de sa décision de ne pas accepter le poste d’économiste en chef de la concurrence. Je l’accepte avec regret », a déclaré sur Twitter Margrethe Vestager, principal soutien de cette candidature. 

 La nomination de cette ancienne de l’Administration Obama, ex-consultante pour Amazon, Apple et Microsoft, a provoqué une grosse polémique à Bruxelles et le président français avait exprimé mardi 18 juillet ses doutes sur ce recrutement. 

 « Étant donné la controverse politique provoquée par la sélection d’une non Européenne pour occuper ce poste et l’importance pour la direction générale [de la Concurrence] d’avoir le plein soutien de l’Union européenne […], j’ai estimé que la meilleure chose était pour moi de me retirer », a écrit Fiona Scott Morton, dans sa lettre adressée à Margrethe Vestager. 

 Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, a félicité cette décision sur Twitter : « Je salue cette décision responsable. La régulation numérique est une des clefs de la souveraineté de l’Europe. » 

 Une nomination qui indignait

 Emmanuel Macron s’était dit « dubitatif » sur la nomination de Fiona Scott Morton à un poste majeur pour réguler les géants de la tech, et avait affirmé attendre des réponses de la Commission européenne. 

 « J’ai essayé d’engager la meilleure personne possible pour ce job », s’est justifiée la commissaire danoise Margrethe Vestager, tout en expliquant qu’il ne s’agissait pas d’un poste décisionnel mais seulement de conseiller. 

 La nomination de Fiona Scott Morton comme nouvelle économiste en chef à la Direction générale de la concurrence avait également suscité des réactions indignées parmi les eurodéputés. 

 La Commission européenne leur avait adressé une fin de non-recevoir ainsi qu’au gouvernement français qui a demandé l’annulation du recrutement de cette professeure d’économie à la prestigieuse université de Yale. 

 Lettre à von der Leyen 

 Mais l’exécutif bruxellois semblait déjà divisé. Cinq commissaires, l’Espagnol Josep Borrell, le Français Thierry Breton, la Portugaise Elisa Ferreira, l’Italien Paolo Gentiloni et le Luxembourgeois Nicolas Schmit avaient écrit à la présidente Ursula von der Leyen pour réclamer une réévaluation de cette nomination, affirmait mardi soir à l’AFP un haut responsable européen, regrettant un manque de débat et de transparence. 

 « Au moment du choix, il n’a pas été explicité que la candidate était américaine et qu’il y avait de potentiels conflits d’intérêts », avait-il affirmé sous couvert de l’anonymat.

Des élus avaient épinglé les anciennes fonctions de Fiona Scott Morton comme responsable de l’analyse économique à la division antitrust du ministère américain de la Justice, entre 2011 et 2012, ou de consultante pour des grands groupes de la tech comme Amazon, Apple et Microsoft. Ils dénonçaient de possibles conflits d’intérêts et le risque d’une ingérence de Washington dans des décisions de l’UE. 

 Le président français avait dit avoir « beaucoup de respect » pour l’experte américaine. Mais il avait rappelé qu'« elle a été embauchée par beaucoup d’entreprises et devrait se porter en retrait de ces situations ce qui rend assez inopérant ce pour quoi on l’embauche », avait-il estimé. Plaidant pour « une autonomie stratégique » de l’Europe, il considérait que la nomination de Fiona Scott Morton « n’est pas forcément la décision la plus cohérente à cet égard ». 

« Shérif américain » 

 « Nous avons mis fin au Far West numérique pour nommer un shérif américain ? […] Cette nomination va à l’encontre de notre souveraineté » , avait estimé l’eurodéputée Stéphanie Yon-Courtin (Renew, centristes et libéraux). 

« L’idée qu’elle a travaillé pour tous les Gafam et qu’à cause de cela, elle ne peut travailler sur le secteur des technologies n’est tout simplement pas vraie », avait expliqué Margrethe Vestager devant les eurodéputés, évoquant des collaborations comme « consultante » mais « jamais comme lobbyiste ». 

 Elle avait reconnu qu’il y aurait quelques dossiers sur lesquels Fiona Scott Morton ne pourrait être impliquée pour éviter des conflits d’intérêts. Mais « il s’agit de très peu de cas, une poignée tout au plus », a-t-elle affirmé, refusant d’en dévoiler la liste pour raison de « confidentialité », malgré les demandes insistantes de plusieurs eurodéputés.

 Ces derniers n’auront donc pas finalement à faire avec l’économiste Américaine. L’UE va donc devoir trouver quelqu’un d’autre, alors qu’elle cherche actuellement à mettre en œuvre de nouvelles législations ambitieuses pour réguler le secteur de la tech.

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